De la France a l'Asie...

la Bosnie

 

BOSN?E

Bosnie 1

21 Avril:

A 4h, lorsque l’alarme a retentie, nous étions déjà éveillés depuis un petit moment. Le corps alerté par l’approche de notre nouveau passage illégal, notre réveil interne fonctionnait plutôt bien.

Cortex et Rassoudok étaient occupés à broutter…pour changer. Cela nous donnait l’avantage de ne pas avoir à les réveiller. Seuls les chiens eurent quelques difficultés à émerger.  ‘’Mais pourquoi donc les poussaient-on si hâtivement hors de la tente a cette heure-ci de la nuit ?!’’.

Une fois toute notre équipe parée nous sommes partis à travers les collines.

foret.

La lune, en plus de nous permettre d’apprécier la vue des montagnes embrumées, était d’une aide lumineuse précieuse. Les éléments semblaient être avec nous. Cela tombait bien, nous en avions bien besoin.

15 minutes plus tard nous entrions en Bosnie. A pas de loup pour la traversée du premier village… tout du moins pour nous et les chiens. C’est une autre histoire pour nos patauds équidés pesant plus de 200 kilos et ayant pour pieds des sabots… Les gardiens aboyeurs alentours n’ont donc pas manqué à leur rôle en prévenant longuement de notre présence.

Leurs efforts sont restes vains. Personne, heureusement, n’est venu jeter un coup d’œil dehors. Une certaine habitude sans doute...

5 heures a sonné. Ou Je devrais plutôt dire 5 heures s’est mit à chanter. Une voix mélodieuse est s’est élevée dans le ciel, arrêtant immédiatement la marche de Cortex et Rassou qui semblaient ouvrir en grand leurs oreilles, l’air intrigués.

Nous étions à l’entrée d’une petite ville. Ce chant sortait directement des mégaphones du minaret qui nous surplombait. L’heure de la prière pour les Musulmans.

Il était tout à coup plus facile de comprendre pourquoi de nombreuses maisons étaient éclairées à cette heure si matinale. Nous croisions même des riverains se promenant dans les rues, qui d’ailleurs ne semblaient nullement s’interroger sur notre présence.

Une nouvelle voix s’est élevée, semblant répondre à la première, puis une troisième… Nous étions à peine en Bosnie et pouvions déjà sentir qu’à partir d’ici de nombreuses choses allaient changer.

Le pays est composé de trois nationalités (Croate, Serbe et Musulman) et divisé en deux grandes régions. L’une se nomme « Fédéracia », habitée majoritairement par les Musulmans, et l’autre est appelée  « Republika Serbska » ou, cette fois, ce sont les Serbes (Orthodoxes) qui sont majoritaires.

Une question m’a immédiatement brûlée les lèvres à l’écoute des premières explications du fonctionnement du pays. Pourquoi considéraient-ils le fait d’être Musulman comme une origine alors que de mon point de vue ce ne pouvait être que religion… La réponse est finalement simple : En 1974, lors de la rédaction d’une nouvelle constitution, ces « Musulmans » ont demandés à être nommés ainsi. Ne se sentant ni Serbes, ni Croates il leur fallait trouver un nom les distinguant de ces deux autres nationalites. Quoi de plus simple que de se faire nommer du nom que leur religion a tous leur fait porter ? Probablement un exemple unique au monde.

Dans l’idée, la mienne, et sûrement la votre également, la Bosnie est peuplée de Bosniaques ou « Bosanac »  comme ils disent ici, mais dans les faits il en est tout autre.

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Pour cette ancienne région de la Yougoslavie la délimitation de nouvelles frontières après la guerre n’a pas suffit à créer une identité nationale. Et ainsi sont rares (très rares) ceux qui se présentent sous ce nom. La plupart se définissent par l’une des trois grandes nationalités citées plus haut.

Pas tant étrange… Comment se sentir un peuple unis alors que massacreurs et massacrés de la dernière guerre vivent toujours côte à côte ? Les images de violences sont encore fraîches dans la tête des uns et des autres, et bien que les populations se mélangent, certains restent effrayés du mal qu’ils ont subit, alors que d’autres se vantent d’avoir tué.

Ce n’était pas évident pour nous d’entendre les discours des uns ou des autres sans protester à l’écoute de certaines paroles racistes ou lors de la négation de faits avérés. Mais lorsque l’on est étrangers et que l’on cherche à apprendre, mieux vaut écouter sans trop contester, car ici, tout juste 16 ans après la fin de la guerre, les conversations sur le sujet s’enveniment vite.

sieste-de-12h   routine   interview 

( sieste. controle de police. interview. la routine... )

L’accueil est certainement une des seules choses commune à tous, toute origine et milieu social confondu. En Croatie nous nous étions laissé entendre que nous serions peu accueillis. Dans un pays très agricole, où les gens ont l’habitude de travailler avec les animaux, cela avait semblé évident que nous passerions presque inapercus.

L’effet fut finalement complètement inverse ! Chaque individu croisé ne pouvait s’empêcher de venir discuter longuement avec nous. Les « Bosniaques » (je les appellerais tout de même ainsi) sont curieux et très sympathiques.

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Chaque jours, tout au long de notre marche, on nous proposait continuellement à boire, à manger…et essayez donc de refuser pour voir ! Nous pouvions d’ailleurs tenter, réponse négative ou pas, on ne nous laissait pas vraiment le choix. Nous avons rapidement compris que nous ne traverserions pas ce territoire rapidement.

Lors de chaque bivouac ou pause du midi proche d’un village, nous étions très vite connus de tous et, chacun leur tour, ou par petits groupes, les riverains défilaient, ramenant presque toujours un cadeau de bienvenue. « Dobro Dosli » nous lancaient-ils, ce mot, je crois, prend une ampleur particulière ici.

 

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Nous étions tant et tant bien recus qu’il nous était compliqué de manger le bout de pain que nous avions acheté par nous même. Ce mois de passage dans le pays fut donc remplit de rencontres géniales, et me permis de parler de mieux en mieux leur langue.

Ce mois fut également très fatiguant. Ce sur-interêt que les gens nous portaient avait un petit inconvénient : nous n’étions jamais seuls.

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Marcher 20km par jour, s’occuper des animaux, faire des rencontres incessantes avec des gens qui ne parlent que leur langue…vous allez rire, mais la réalité est là, c’est quelque peu fatiguant. Et croyez moi, les temps de repos pour nous là-bas  n’existaient pas. Le peu de fois où nous nous sommes laissés aller à siester, nous étions systématiquement réveillés… Comment leur en vouloir alors qu’ils vous tirent du sommeil une tarte a la main ? Ce peuple est tellement gentil.

Gentil avec nous mais pas seulement, ce sont certainement les premiers depuis notre départ qui s’inquiètent autant de notre bien être que de celui de nos animaux.

Pour eux les cadeaux les plus réguliers étaient foin et «Kukuruz»(mais) pour les équidés, restes et os pour les chiens.

« Pourquoi donc du foin à cette période de l’année ? » me direz vous. Les Bosniaques raffolent de viandes et leurs nombreux animaux, avant qu’ils ne finissent en tranche, doivent évidemment être nourris. De fait, presque tous les champs utilisables servent à cette fin. On ne peut pas dire qu’ici l’herbe pourrit dans les champs. Même celle des bords de route et fossés est ramassée. Et à la faux s’il vous plait !

Dans ces conditions nous ne pouvions pas camper dans les champs de foin, nous étions donc obligé (c’était bien la première fois) de demander une autorisation pour camper chaque nuit.

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Alors quand nos hôtes ne trouvaient pas d’endroit où l’herbe était à profusion pour nos poilus, ils nous ramenaient des bottes. Nous sommes bien loin des mentalités de l’Europe de l’ouest. Plus nous nous éloignons, moins les gens ont, et pourtant plus ils donnent.

Comme nous l’avions décidé, nous avons traversé le pays par la partie nord. La zone la moins montagneuse se trouvait là et nous permettrait d’avancer vite…si j’ose dire.

Le réseau routier Bosniaque nous facilitait la tâche. Les petites routes, très souvent non asphaltées nous menaient à bon port sans aucun détours. Fort appréciable au  vu des nombreux kilomètres de rab réalisés dans les pays précédant.

Nous aurions donc pu avancer rapidement. Ce ne fut évidemment pas le cas puisque, comme je l’ai déjà souligné, nos nombreux hôtes appréciaient notre présence. Une fois de plus notre marche se faisait tranquillement. Avancée lente mais tellement pleine d’apprentissage…

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Ces chemins campagnards que nous empruntions nous ont permis, entre autre, la chance de découvrir une sympathique réalité du pays. Les gens travaillent encore beaucoup à l’aide de chevaux. Parfois labourant les champs, parfois tirant une carriole ou portant le bas, il était très rare de ne pas en croiser dans une journée.

Rassoudok  s’appliquait à les regarder passer. Par contre quand l’un d’entre eux tentait de l’approcher… il le fuyait, l’air pas vraiment rassuré. Bien moins dangereux pour lui de passer des heures à renifler leur crottin.

Cortex, lui, semblait devenir fou lorsque ses compatriotes tiraient des charettes. Il est peut être jaloux. Il va pourtant falloir qu’il s’habitue, plus nous avancons vers l’est et plus la coutume est telle.

Le seul ennui, et pas des moindres, dû a ces chemins toucha leurs pieds. « Pas de pied, pas d’âne » dit-on. Et ils deuvent évidemment être d’autant mieux soignés que quand ils sont sollicités presque tous les jours.

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Jusque là ni Cortex ni Rassou n’ étaient ferrés et leurs pieds se portaient très bien. Cependant, en Bosnie les routes non-asphaltées sont pleines de cailloux, de plus ou moins touts les tailles qui se faisaient une joie de former des crevasses entre la sole et le sabot de nos équidés. Nous avons dû nous rendre à l’évidence…il allait falloir les ferrer.

Nous étions proches de la frontière Serbe, et trouver un Maréchal, aux dires des riverains, serait plus simple là-bas.

Nous nous sommes ainsi mis à accélérer le pas.

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27 Mai

Lors de notre passage à Bjeljina, dernière ville Bosniaque à traverser, nous sommes passés dans une clinique vétérinaire. Cette fois nous voulions être sûr de pouvoir passer par la grande porte et non par la forêt.

La clinique était grande et pourvue de plus d’une pharmacie, nous pensions donc pouvoir trouver tout ce qui nous serait nécessaire ici. Mais c’était bien sûr sans compter sur le fait que nous étions en Bosnie… Il ne nous ont donnés que de vagues informations non assurés sur le passage de la frontière. La seule chose sûre était la formelle nécessité d’avoir à pratiquer un test concernant l’anémie infectieuse récent de moins de trois mois.

Nous avions bien effectué ce test…six mois plus tôt ! Le refaire signifiait ici 20 jours d’attente pour avoir les résultats.

bibi.

Devant l’insistance du véto qui ne cessait de répéter « Idete i probate » (Allez et essayez), nous nous sommes résolus à tenter l’entrée dans le pays sans ce papier. La ‘’granica’’ (frontière) se trouvant à douze kilomètres il serait facile de faire venir un vétérinaire en cas d’obligation du test.

Nous étions inquiets. Je souhaitais de toute mon âme que les douaniers nous laissent passer. Jusqu’à présent la seule frontière où nous avions été contrôlés ne nous avait pas laissé entrer. Mais il ne fallait pas rester sur cet échec Croate. Cette fois tout se passerait bien…

Il vallait mieux d’ailleurs, car si voyager en Europe à pied, avec des équidés semble si compliquer (pour nous du moins…), qu’en serait-il de l’Asie ?!

Cette étape allait être cruciale pour La continuité de notre projet. Plus nos pas se rapprochaient du fleuve Drina, séparant Bosnie et Serbie, plus la tension montait. Mais quand il faut y aller…

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